L’école de criminologie de l’Université de Kinshasa a organisé la cinquième défense de master en criminologie, option gestion de la paix et des conflits ce mardi 19 Mars 2024.
Politologue de formation, député national élu de la ville de Kinshasa et président du parti politique « Action Commune pour la République », ACR en sigle, Eliezer Ntambwe Mposhi charmant a consacré sa recherche sur les: Perceptions des dynamiques des interactions des électeurs sur les élus à Kinshasa, RD Congo. Processus de légitimation.
Sa recherche décrit les perceptions des électeurs sur les élus pendant le processus électoral. Elle met en lumière les dynamiques de la nature de ces interactions à partir des perceptions des électeurs.
Eliezer Ntambwe s’est appesanti sur une démarche empirique qui implique les présupposés implicites et des stéréotypes dont la plupart sont constitués de savoir commun ci-après : le peuple n’est pas content du travail des députés, les députés s’en foutent de la souffrance du peuple, ou encore un refrain d’une chanson en lingala : boma deputé, tika policier pour ceux qui habitent Kinshasa, en tshiluba dans le grand Kasaï: ba députés mbimvi …
A en croire le récipiendaire, cette situation a été aggravée par la distribution des véhicules de la marque Palissade aux députés par le Gouvernement et de la révélation que les députés toucheraient 21 000$ par mois alors que les électeurs (la population) croupissent dans la misère et manquent des infrastructures de base et accèdent difficilement aux besoins primaires.
Afin de mieux saisir ces perceptions, Eliezer Ntambwe s’est penchée sur les discours et les interactions entre les deux protagonistes : Les électeurs d’une part et les élus d’autres part, pendant le processus électoral qui conduit à l’élection du candidat afin d’élucider les implicites partagés par les électeurs particulièrement, ceux de la ville de Kinshasa.
Sa recherche s’est située à l’intersection des cadres théoriques des perceptions et des normes pratiques. La première grille de lecture analyse les dynamiques des interactions entre les électeurs et les élus pendant le processus électoral. Elle met en lumière les dynamiques de la nature de ces interactions à partir des perceptions des électeurs. La grille théorique de normes pratiques a été également mobilisée par cet élu du peuple pour légitimer les dynamiques des électeurs dans leurs rencontres avec les élus étant donné qu’il s’agit d’un conflit dont certains électeurs ont capitalisé.
Eliezer Ntambwe a recouru à l’approche qualitative qui lui a permis de confronter les données récoltées à travers le corpus discursif et observationnel réalisés à travers les entretiens semi-directifs à partir de la détermination des groupes stratégiques constitués essentiellement des membres des partis politiques, des populations commerçantes occupant la place Victoire, les membres des ONG qui s’occupent de la question électorale, les autorités administratives au niveau des communes et quartiers. Au total 48 entretiens ont été réalisés. C’est à travers une analyse de contenu dans sa variante thématique que le récipiendaire a pu accéder aux caractéristiques communes dans les propos de ses personnes ressources.
A l’en croire, la légitimation des élus est un processus complexe où ces derniers cherchent à obtenir la reconnaissance et l'acceptation des électeurs. Cela passe par l'utilisation de discours politiques persuasifs et d'actions sociales visant à démontrer leur accessibilité et leur engagement envers la communauté. Cependant, dans le contexte actuel insiste-t-il, la légitimité politique est remise en question, avec un accent croissant mis sur la transparence et la proximité des politiciens avec les électeurs. En fin de compte, Eliezer Ntambwe note que la légitimité des élus repose sur une relation mutuelle avec les électeurs, façonnée par la reconnaissance sociale et la satisfaction des besoins matériels, avec les discours politiques et les actions sociales comme principaux moyens de construction de cette légitimité.
Les électeurs étant dans une perspective de recherche d'opportunités, se focalisant sur la perception des candidats comme détenteurs de pouvoirs politiques, financiers et familiaux, ainsi que sur la quête d'opportunités d'emploi pendant leur mandat. Les électeurs construisent leur interaction avec les candidats en fonction de leur capacité perçue à fournir des avantages matériels et sociaux, tels que l'emploi pour les jeunes, les services gouvernementaux et l'aide financière. Certains voient les candidats comme des bienfaiteurs, offrant une assistance aux pauvres et aux nécessiteux, tandis que d'autres critiquent l'utilisation abusive des ressources gouvernementales à des fins électorales. Selon Eliezer Ntambwe, la relation entre candidat et électeur repose sur une acceptation mutuelle, où les électeurs cherchent à s'installer dans une certaine catégorie sociale en fonction des opportunités que pourrait leur offrir l'élu, soulignant ainsi la recherche constante d'opportunités comme un élément central de la légitimation des élus.
Le revers de la médaille dans cette légitimation selon le récipiendaire se manifeste par les fissures dans l'acceptation mutuelle entre électeurs et candidats, mettant en lumière deux aspects principaux : le retrait de l'échelle en tant que fermeture des opportunités économiques et le retrait de l'échelle en tant que restriction de l'accessibilité aux élus.
Après un échange salutaire entre le récipiendaire et les membres du jury, l’heure du verdict a sonné. Le candidat Eliezer Ntambwe Mposhi Charmant termine son master avec la mention grande distinction.
Très ému, il a tenu à rappeler que la manière dont des électeurs voient leurs interactions avec les candidats aux élections dépend de leurs intérêts. Il ressort de sa recherche que le commerce entre ces deux acteurs navigue essentiellement entre deux pôles. Celui de l’acceptation mutuelle d’une part et celui du retrait d’échelle qui manifeste la rupture de cette acceptation d’autre part. L’acceptation mutuelle, loin d’être simplement un nœud affectif entre ces acteurs, apparaît comme la résultante d’une alliance entre deux enjeux de base portés, l’un par l’aspirant à un mandat électif et l’autre par le « souverain » primaire, l’électeur. Il faut reconnaître que construite ainsi, la dynamique des interactions entre le candidat et l’électeur ne livre pas l’ensemble de sa complexité, dont une part importante peut se dégager de la perception même du candidat à l’élection ou de l’élu, que sa recherche n’a pas mis en exergue et qu’il serait intéressant d’envisager à travers d’autres recherches.
Joël Nzamps